Lorsque l’équipe naissante du projet de la « Trame » – dispositif d’accueil et d’accompagnement – a sollicité en 2014 le laboratoire UTRPP de l’Université Sorbonne Paris Nord et plus particulièrement Pascale Molinier, il s’agissait pour nous de mettre en place une praxis. Praxis que nous considérions comme l’articulation complexe ou l’ensemble réunissant deux faces – agir et penser – artificiellement séparées au nom de la pratique et de la théorie.
Plus tard cette problématisation, liée à nos usages et à la rencontre avec les personnes en souffrance psychique et sociale, s’est heurtée à la question de l’évaluation. Comment poursuivre le récit de ce qui est en question lorsque nous accueillons une personne ? Comment le rendre audible à nos différents interlocuteurs ? Comment transformer notre dispositif de manière à maintenir des conditions d’accueil suffisantes tout en rendant compte d’une activité et en évaluant le coût-bénéfice de notre action ? Comment penser la circulation de l’argent dans le dispositif et la rétribution des usagers qui y produisent des services ? Quelles réponses d’autres avant nous avaient esquissé, notamment dans le mouvement de la psychothérapie institutionnelle ?
Il semble qu’une façon de transformer ces problèmes ait consisté à ce que chacun ou chacune, « praticiens » et « chercheurs », prennent la mesure du territoire sur lequel ils ou elles opéraient, et travaillent à sa perméabilité : la Trame et les participants de la Trame se sont immiscés dans les couloirs de l’université, de même que l’université s’est rendue dans les lieux où cela se passe. Ces variations permanentes de perspectives auront peut-être contribué à maintenir la possibilité d’une mise en question du dispositif de la Trame et de son contexte institutionnel… dans une « recherche-action permanente » pour tenter de transformer l’impératif d’évaluation en une source d’enseignement.


Christophe Mugnier, Clarisse Monsaingeon, Pascale Molinier dans la revue Psychiatrie Psychanalyse et Sociétés